Lot n°

Suite de trois plaquettes

Adjugé 58 000 €
Avers -   Joachim chassé du Temple ou l’Offrande refusée : sur fond d’architecture, sur la gauche, le grand-prêtre, accompagné d’un religieux, fait un geste de refus à Joachim tenant un agneau dans ses bras ; derrière lui, plusieurs personnages dont sainte Anne. Inscription en partie illisible I en chiffre romain [ ?]TRE  IOA[A ?]CH? (Prêtre et Joachim ?)

Revers -  La Rencontre à la Porte d’Or : les deux vieux époux, Anne et Joachim, s’embrassent tendrement devant la porte des remparts de Jérusalem ; sur la droite, l’Annonce de l’ange à Joachim. Inscription II en chiffre romain LA PORTE DOREE.

Plaque 2

Avers -   L’Annonciation : à droite, la Vierge, les mains jointes, se tient devant un prie-Dieu sur lequel est posé un livre ouvert ; à gauche, l’archange Gabriel s’adresse à elle, l’index pointé vers le ciel et tenant une banderoleportant la salutation angélique AVE GRÃ [CIA]  PLENA  D[OMI]Ñ[U]S TEC[UM] (Je te salue, Marie pleine de grâce, le Seigneur est avec toi) ; entre les deux, le vase avec la tige de lis ; la scène se déroule dans un chœur bordé d’arcatures avec fauteuil curule d’officiant sur la droite, dans la coupole, Dieu le Père bénissant dans des nuées. Inscription  V  en chiffre romain  LANVCIACI? (L’Annonciation)

Revers -La Nativité aux Bergers : Joseph, appuyé sur un bâton, et Marie, les mains jointes, se tiennent de part et d’autre de la corbeille d’osier dans laquelle repose l’Enfant Jésus ; derrière elle, le bœuf et l’âne sous un abri, au-dessus de la corbeille, trois anges en adoration et deux bergers derrière un plessis ; fond d’architecture avec toiture de chaume et baies cintrées devant lesquelles volent deux anges ; en haut à gauche, l’Annonce aux Bergers. Inscription VI en chiffre romain  LA NATIVITE NRE SEIGNR (La Nativité de notre Seigneur)

Plaque 3

Avers -   L’Adoration des Mages : Les trois rois sont sur la gauche, le plus âgé, agenouillé et les mains jointes devant Jésus assis sur les genoux de sa Mère ; Joseph se tient debout à l’arrière ; cadre architecturé reprenant en partie celui de la Nativité ; premier plan avec pans de murs ruinés. Inscription VII en chiffre romain  LES TROIS ROIS.

Revers -Le Couronnement de la Vierge : la Vierge se tient les moins jointes entourée de quatre anges ; au-dessus d’elle la Trinité représentée par le Christ tenant la croix, Dieu le Père plaçant la couronne et le Saint-Esprit, la colombe dans ses mains ; un ange entouré de nuées dans chacun des angles supérieurs.  Inscription  VIII en chiffre romain LE COV   RONEMENT.

Chaque plaquette est dans son cadre d’origine mouluré présentant une fente sur l’un de ses petits côtés. Les inscriptions faites à main levée dans les parties inférieures de chaque scène peuvent apparaître maladroites comparativement au travail de l’orfèvre. Elles sont cependant d’origine. Leurs abréviations correspondent bien à l’épigraphie de l’époque. Une goutte d’émail vert comblant le trait marquant l’abréviation surmontant le O dans ANVCIACIO indique bien que cette inscription a été faite avant le passage à l’émaillage.

Pays-Bas du sud, Bourgogne ou Paris, vers 1510-1530

Hauteur : 4,5 cm – Largeur : 3,3 cm

Provenance :   ancienne collection Charles-Henry-Lionel Widdrington Standish of Standish (1823-1883), restée depuis dans sa descendance familiale

(très légers accidents, deux éraflures sur la Nativité aux Bergers)

Les sources gravées de ces petites scènes ne sont pas aisées à identifier. Pour l’Adoration des Mages, il semble que l’orfèvre se soit inspiré de la gravure de Dürer (1503), tirée de la Vie de la Vierge, pour le groupe de trois personnages de la partie droite (fig.a). Le style de ces petites scènes semble d’ailleurs fortement  influencer par la sphère germanique ou flamande ; des détails comme la longue chevelure tombant dans le dos de laVierge du Couronnement comme les petits rinceaux ornant le prie-Dieu de la Vierge de l’Annonciation et la chaire du grand-prêtre le font penser. Les éléments architecturaux avec ses arcs surbaissés appartiennent déjà au XVIe siècle avec une légère présence encore du gothique visible sur les fenêtres surmontées de pinacles de la Rencontre à la porte dorée. Il s’agit bien ici d’une œuvre d’orfèvrerie que l’on peut qualifier de première Renaissance où on lit encore l’empreinte du gothique.

La technique des émaux translucides sur basse-taille a été mise au point dès la fin du XIIIe siècle par les orfèvres toscans. Elle a rapidement gagné au siècle suivant la France, la Rhénanie, les Flandres ou l’Espagne. Elle a connu une apogée grâce aux ateliers parisiens qui ont donné une production abondante et de qualité essentiellement exécutée sur argent. Elle s’est poursuivie ensuite mais dans une moindre mesure au XVe siècle. La basse-taille sur or est quant à elle beaucoup plus rare, réservée à des commandes prestigieuses proches du pouvoir royal ou des grandes cours européennes. Davantage sujettes aux fontes, les œuvres d’orfèvrerie de basse-taille sur or sont ainsi peu nombreuses. Les seules comparaisons que l’on peut établir entre les plaquettes et d’autres œuvres de préciosité et de facture équivalentes appartenant à la fin du Moyen Age ou au début de la Renaissance se réduisent à quelques pièces :

- un pendant de rosaire, cependant composite, qui représente la Rencontre à la Porte d’or visiblement inspirée de la même gravure que la scène II des plaquettes, vers 1440/50, Flandres ou Bourgogne (Metropolitan Museum de New York, inv. 1975.1.1522, fig.b)

-  un rosaire aux grains en forme de cœur illustrant également la Vie de la Vierge, Bourgogne, vers 1460 ou, selon les sources, France ou Flandres, vers 1480 (Schatzkammer der Residenz de Munich, fig.c)

- Le trône du Baiser de Paix de l’Enfant Jésus, Paris ?, début du XVIe siècle (Valence, Espagne, trésor de la cathédrale, fig.d)

- Le collier de la Toison d’or, dit Potence, Pays-Bas méridionaux, vers 1517 ou selon les sources, atelier des Pays-Bas, vers 1530 (Kunsthistorisches Museum de Vienne, inv. Schatzkammer, WS Dep Prot, fig. e).

Les disparités tant dans les époques que les origines géographiques dénotent bien la difficulté que les historiens d’art et les conservateurs de musée rencontrent parfois à dater et à situer avec exactitude cette production luxueuse. Dans cette partie de l’Europe, à une époque où les alliances ont fait basculer certains territoires, il est en effet délicat de déterminer le lieu d’exécution d’une œuvre compte-tenu que les artistes pouvaient se déplacer d’atelier en atelier entre certaines grandes villes, suivant les commanditaires du moment. En ces premières décennies du XVIe siècle, le paysage politique n’est plus le même que durant la majeure partie du siècle passé. Depuis le mariage de Maximilien de Habsbourg  avec Marie de Bourgogne, le domaine bourguignon n’est plus unifié entre le duché accaparé par le royaume de France et le comté faisant partie des terres de l’Empire sous domination espagnole. Les villes bourguignonnes et celles des Pays-Bas méridionaux rivalisaient ainsi avec Paris pour attirer les meilleurs artistes. Ces plaquettes ne peuvent avoir été réalisées que par un orfèvre réputé, proche du pouvoir royal ou travaillant pour les Habsbourg. On pense par exemple aux magnificences du monastère de Brou que Marguerite d’Autriche a dépensé pour le mausolée de son époux bien-aimé.

Ces plaquettes témoignent d’une grande prouesse technique, le Maître orfèvre ayant poussé au plus loin son art. Les plaques en or fin (24 carats), d’à peine un millimètre d’épaisseur, ont été gravées et ciselées sur les deux faces assez profondément pour recevoir des émaux. La vivacité de leurs couleurs et leur translucidité permettent ainsi de rendre les reliefs des fonds particulièrement chatoyants leur donnant une profondeur et un aspect décoratif d’une grande préciosité. Ces trois plaques illustrent seulement six scènes de la vie de la Vierge numérotées en chiffres romains I, II, V, VI, VII et VIII, allant du début avec l’Offrande de Joachim refusée par le grand-prêtre à la fin avec son Couronnement. Il s’agirait d’un cycle de huit scènes, les deux manquantes (III et IV) pourraient être la Visitation et le Mariage de la Vierge. Les fentes présentes sur l’un des petits côtés de chaque plaque font envisager un montage offrant cette disposition (image recto / verso). Ont-elles été ensuite enchâssées dans une monture permettant de composer un petit tableau double face ? Formaient-elles ainsi un pendant à un cycle de la Passion dans une sorte de diptyque à l’image des retables gothiques sur fond or ? Il est désormais difficile de répondre à présent à ces interrogations.

Ouvrages consultés : J.P. Lecat, Le siècle de la Toison d’or, Paris, 1989 ; R. W. Lightbown, Mediaeval European Jewellery with a catalogue of the collection in the Victoria & Albert Museum, Londres, 1992, p 462 ; U-B. Frei et F. Bühler, Der Rosenkranz, - Andacht Geschichte Kunst, Berne, 2003, p 313 ; Exposition Paris 2004, Paris . 1400 – Les arts sous Charles VI, musée du Louvre, cat.97 ; Expositions Berne – Bruges – Vienne 2008/2010, Splendeurs de la Cour de Bourogne – Charles le Téméraire  (1433-1477), Musée hitorique – Bruggemuseum & Groeningemuseum – Kunsthistorisches Museum, S. Marti, T.H. Borchert et G. Keck sous la dir. de, cat. ; I. Biron, Emaux sur métal du IXe au XIXe siècle – Histoire, technique et matériaux, 2015, pp.270-291.


 


 

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Suite de trois plaquettes en or gravé et émaillé dans des cadres en bronze doré, émaux translucides et opaque sur or de basse-taille, ornées double face de six scènes de...

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